Clair obscur
Ton visage se détache dans l’ombre de ma chambre comme un croissant de lune par une nuit d’hiver sans étoile. Tu es mon pire cauchemar. Mon plus doux rêve. La délivrance d’une douleur certaine. L’annulation de tout ce que je suis. Tes yeux sont le reflet de mes désirs les plus fous. Et pourtant, ils me font peur. Tu es fragile comme la flamme d’une bougie mais, comme elle, tu brûles et tu fais mal. Tu es sournois et vil, mais tu restes encore mon dernier espoir.
Tes traits si beaux, si délicats, si doux … On dirait un enfant. Un éternel enfant, depuis la nuit des temps. L’enfant de la dualité. L’alliance du soleil et de la lune, du jour et de la nuit, de la lumière et de l’ombre. Malheureusement, tu as suivi la voie du mal. Tu aurais pu être un ange. D’ailleurs, tu en es un. Un ange déchu, peut-être. Un ange qui se serait brûlé les ailes à trop vouloir faire le bien. Depuis, tu fais le mal.
Tu donnais des vies, avant. Tu avais ce statut si particulier qui te rendait trop proche de Dieu. Alors, pour préserver son pouvoir, ce dernier a changé ton pouvoir. Désormais, tu prends les vies. Tu sépares les âmes et les corps, tuant ces derniers en laissant les premières s’envoler à tous vent. Tu étais Dieu, ou presque.
Aujourd’hui, tu n’es plus rien. Pour tous les mortels, tu n’es qu’un instrument de Dieu. Surnommé … la Mort.
Tu n’es que cet outil de la main du maitre du monde, celui qui sert à équilibrer la balance. Mais tu es le mauvais côté de l’équilibre. Tu es celui dont on a peur. Tu fais trembler les gens, qu’ils soient jeunes ou vieux, entre deux âges. Universellement, tu inspires la crainte et l’angoisse, la peur de la solitude. Tu es représenté par le noir, le néant, les ténèbres. Souvent, on te donne l’apparence d’un squelette, sur les illustrations. Dans l’imaginaire des gens, tu n’as aucune forme spéciale. D’ailleurs, on évite de t’évoquer. Seuls les fous pensent à toi. Les âmes torturées, brisées, blessées, dérangées.
Donc, tu ne connais pas le goût du bonheur. Depuis le début de l’éternité, tu es prisonnier de ton statut d’ange déchu. D’ange du mal. La Mort. Et depuis des temps immémoriaux, tu viens accomplir ce pourquoi tu existes encore. Aujourd’hui, c’est mon tour. Mais tu es surpris. N’est-ce pas. Pour la toute première fois, tu attends. Tu m’écoutes. Tu sais que j'essais de t’apprivoiser, de passer un marché avec toi. Mais, pour une fois, tu es interpelé. Parce que jamais personne ne t’a compris comme moi je te comprends.
Tu souris. C’est triste. Ton visage se pare d’un éclat étrange. Tu ne dois pas avoir sourit depuis longtemps. Peut-être n’as-tu jamais souris, d’ailleurs. Mais peu importe. Je lis dans tes yeux que tu accompliras quand même ton acte. Tu n’as rien dans les mains, pas de faux, pas d’os, pas d’horloge. Comment vas-tu prendre mon âme et tuer mon corps, alors ?
Il te suffit d’un geste. Tu lèves la main, comme un enfant pour demander une permission à son maître d’école. Mais tu ne demande rien. Jamais rien. A personne.
Et, sous ton geste en apparence anodin, mon cœur a cessé de battre.
Gane.
J'avais écrit ce texte pour une galerie textuelle sur Skyrock. J'ai d'ailleurs été sélectionnée. Aujourd'hui, je n'ai plus de blog et je ne participe plus à ce genre de jeu. Cependant ... Ce texte là, j'en suis assez fière. J'y tiens beaucoup. Mais cela ne m'empêche pas d'être ouverte aux critiques, tant qu'elles sont constructives.
Qu'en pensez vous, en toute honnêteté ?